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Les Malaisiennes redéfinissent la place de la femme dans le domaine technologique

La traduction présentée ici est celle de l'article « «Malaysian women redefine gender roles in technology » de Ruth Shechter publié le 8 février sur le site de l'université de Stanford.

Selon des études, les femmes occupent plus de la moitié des emplois des États-Unis, mais seulement 24 % de ceux liés à l'informatique, représentant ainsi un énorme réservoir de talents inexploités. Les chiffres n'évoluent pas en faveur de l'augmentation de la participation des femmes aux nouvelles technologies. En 2008, seulement 18 % des diplômés en informatique étaient des femmes alors qu'en 1985, elles étaient 37 %, soit plus du double d'aujourd'hui.

Alors que la technologie devient de plus en plus omniprésente et importante, pourquoi n'y a-t-il pas plus de femmes revendiquant leur place pour participer à cette montée en puissance ? Ces chiffres révèlent-ils un système défectueux qui décourage les femmes d'entrer sur le terrain ? Ou est-ce une conséquence de perceptions involontairement sexistes ?

La réponse se trouve peut-être en Malaisie, où les femmes représentent entre 50 % et 60 % des employés de l'industrie informatique et beaucoup d'entre elles occupent des postes de middle et top management. L'essor du domaine technologique a entraîné des changements radicaux dans le rôle des femmes dans la société Malaisienne, modifiant ainsi les normes sociales dites traditionnelles.

"Aux États-Unis, technologie et masculinité sont très liés, ce qui n'est pas le cas en Malaisie", explique Ulf Mellstrom[1], qui a analysé la question lors de sa présentation « L'Intersection des Genres, Race et Frontières Culturelles : ou pourquoi l'Informatique en Malaisie est dominée par les femmes ? » : "En peu de temps, l'industrialisation en plein essor a créé de nouvelles opportunités pour les femmes tout en transformant et réformant la société établie."
Mellstrom a mené une étude sur des étudiantes en vue de son nouveau livre sur les femmes Malaisiennes[2] dans l'industrie informatique. Contrairement aux États-Unis, en Malaisie les emplois en informatique sont considérés comme appropriés pour les femmes : les hommes ne perçoivent pas le travail  de bureau ou en intérieur comme masculin et une grande partie de la société stigmatise les femmes qui travaillent sur le terrain comme issues de classes inférieures. L'informatique et la programmation sont donc considérées comme des professions « femme-friendly », avec beaucoup d'opportunités puisque les hommes ne sont pas intéressés par la compétition pour ce type d'emplois. Mellstrom indique que : "C'est un monde de femmes à cet égard".

À l'origine, les femmes avait quitté leurs villages pour chercher des opportunités urbaines dans l'industrie de l'électronique, où elles étaient recrutées massivement pour leur dextérité et leur souhait de travailler en intérieur. Le remplacement des emplois de l'électronique par les nouvelles technologies a été une opportunité pour les jeunes diplômées qui ont su facilement s'imposer. Cette transition a été également en partie facilitée parce que ces femmes pouvaient s'identifier à des modèles féminins dans leurs entourage (mère, tante, amie...) travaillant dans l'électronique, ce qui n'a pas eu lieu pour l'industrie informatique américaine.

Les femmes malaises en particulier considèrent l'éducation comme un moyen de devenir plus indépendantes. Dans les villes, ces femmes jeunes, indépendantes et qualifiées sont très largement représentées dans le secteur de l'informatique.

Selon Mellstrom, la forte présence des femmes dans le secteur informatique sert à leur tour de modèle pour les autres femmes et établit un «espace symbolique» où il peut être démontré que les femmes peuvent exceller – et excellent – dans ce domaine. La participation des Malaisiennes à cette montée en puissance technologique a été favorisée également par le manque d'experts bien formés en informatique dans les industries de Malaisie.


[1]     Professeur ès « parité et technologie» de l'Université Technologique de Luleå en Suède et chercheur à la faculté Clayman aux États-unis. Également auteur du livre "Masculinité , Puissance et Technologie : Une ethnographie de la Malaisie"

[2]     Les Malaisiens représentent l'ensemble des personnes vivant en Malaisie : Malais, groupe ethnique majoritaire (62 %) du pays, Chinois (25%) et Hindous (10%).

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